– Non, non, mais… Mais c’est que sinon il n’y aurait pas d’objet. […] Enfin, s’il y avait juste… c’est magnifique, l’idée des sensations éparses. On a des touchers, on a des olfactions, on a des ouïes, des auditions, on a des visions, parfait. Je dois en oublier…
– La parole n’a pas de place.
– Mais très bien sauf que dans ce cas vous n’avez… vous êtes… eh… il n’y a pas d’objets. Vous n’avez pas de monde. Si je ne peux pas dire que ce marron ou ce doux ou ce dur…
– Mais à quoi bon le dire ? Pourquoi le dire ?
– Non, mais si je ne peux pas dire que c’est un plancher, il n’y a pas de plancher. Je veux dire s’il n’y a pas de communication entre mes sensations, il n’y a pas d’objets. S’il n’y a pas de sens commun, le sens commun, c’est la parole.
–Non. Non, non, non.
– Non ? Vous arrivez à avoir des objets…
– Non, non, non, le plancher ne disparaît pas si vous ne le nommez pas.
– Ah bah, moi, si. Tout de suite.
– Vous pouvez très bien ne pas donner de nom au plancher, il ne va pas disparaître. Non.
– Ah… vous ne saurez pas que c’est un plancher, c’est quoi ?
– N’importe.
– Et… mais non. Non.
(The Philosopher & the Lawyer. In: Imagine A Situation Where the Rules of the Game Change. 2012)